
Le feuilleton de tentative de coup d’État au Bénin ayant abouti à la condamnation à 20 ans de prison des proches de Patrice Talon laisse indifférent plus d’un. Par le truchement d’une analyse politique, la personne ressource d’Akpakpa, Omer Chanvoedou s’invite dans le débat et donne son point de vue.
Lire l’intégralité de son analyse politique
Par Ayato Gbèdè
Bonjour à tous,
Suite au verdict rendu par la Cour de répression des infractions économiques et du terrorisme (CRIET), condamnant les trois principaux accusés Olivier Boko, Oswald Homeky et Rock Nieri à 20 ans de réclusion criminelle, à la saisie de leurs biens à hauteur de 60 milliards de francs CFA, ainsi qu’à une amende de 4,5 milliards de francs CFA chacun, et acquittant les trois autres, il est pertinent d’analyser cette décision et d’en tirer des conclusions après en avoir pris acte conformément à la loi. Je prends donc acte de la décision rendue par la cour.
Avant le verdict, la veille du jour j, j’avais émis trois hypothèses possibles, selon qu’ils seront acquittés ou condamnés.
1- oui m, ils sont coupables
2- non, c’est un complot du président Patrice Talon pour effacer son ami Olivier Boko de la course de 2026
3 – c’est un cirque de victimisation pour aider olivier Boko à accéder à la Marina
Maintenant que le dossier est vidé, que faut-il retenir ?
1. Confirmation de la tentative de coup d’État :
Oui, l’analyse des faits tels que présentés par le réquisitoire du procureur spécial confirme clairement qu’il y a eu l’intention de quelque chose de très grave dans cette affaire.
Les condamnations prononcées par la CRIET attestent de l’existence d’une tentative de coup d’État contre le président Patrice Talon le 24 juillet 2024. Il n’y a plus de doute sur l’intention de faire le coup
Il est particulièrement regrettable de constater l’implication d’Olivier Boko, chrétien de surcroît, considéré par tous comme le plus proche ami et frère fidèle du Président de la république, celui-là à qui il a pourtant concédé autant de privilèges. Tout le monde est choqué, surtout les frères en Christ, même si certains tentent de justifier l’injustifiable par l’avènement de lois dites liberticides ou d’exclusion.
Selon les informations disponibles, Olivier Boko, homme d’affaires et ami de longue date du président, et Oswald Homeky, ancien ministre des Sports, ont été reconnus coupables de « complot contre la sûreté de l’État » et de « corruption d’un agent public ». Ils ont tenté de soudoyer le Colonel Tévoèdjrè Commandant de la garde présidentielle pour exécuter un coup d’état à la Bazoum au Niger.
Ce colonel déclara qu’ils sont tombés sur la mauvaise personne, car lui n’est pas prêt à trahir la République. Pas du tout.
2. Nécessité de témoignages clés :
Les accusés ayant plaidé non coupable, il aurait été judicieux d’obtenir le témoignage direct du président de la République pour corroborer les affirmations du colonel Djimon Dieudonné Tévoédjrè, commandant de la garde républicaine, qui a déclaré avoir été approché par Oswald Homeky en septembre pour planifier le renversement du gouvernement et d’en avoir averti son Patron avant de se rendre au domicile du ministre Oswald Homeky.
De même, une confrontation sérieuse était nécessaire entre les deux principaux mis en cause pour déterminer clairement la destination réelle des fonds mobilisés, quand l’un prétend qu’ils sont destinés à financer les mouvements OB 2026 et l’autre déclare qu’ils sont plutôt destinés à financer un projet de commerce de boissons, montrant clairement qu’il y a aiguilles sous roche..,.
3. Risque de recours juridiques :
Les avocats des condamnés pourraient envisager de reprendre du service et de saisir des instances supérieures, tant au niveau régional qu’international, pour contester les décisions de la CRIET, en se basant sur plusieurs arguments :
1- Composition de la Cour :
La CRIET était composée de trois juges au lieu des cinq prévus par le code de procédure pénale béninois, ce qui pourrait être considéré comme une irrégularité procédurale et entraîner une nullité pure et simple.
2- Impartialité de la présidente de la Cour :
Les accusés ont mis en cause les liens présumés entre la présidente de la CRIET et le président de la République, ce qui pourrait soulever des questions sur l’impartialité du tribunal.
3- Absence d’assistance juridique :
Les avocats des accusés se sont retirés en pleine audience pour protester contre la composition de la Cour, laissant ainsi leurs clients sans défense légale à un moment crucial du procès, sachant bien que la désignation d’avocats d’office par l’état n’avait aucune chance d’aboutir.
4- Insuffisance de preuves contre Olivier Boko :
Contrairement au cas du ministre Oswald Homeky qui est clairement reconnu coupable d’avoir manipulé de grosses sommes d’argent liquide aussi bien à Cotonou qu’à Abidjan et qui a du reste reconnu son lien avec le colonel Tévoèdjrè le garant de la sécurité de l’État, aucun élément probant ne lie directement Olivier Boko au projet de coup d’État, le colonel Tévoédjrè ayant reconnu n’avoir jamais discuté avec lui personnellement.
De plus, les fonds fournis par Boko pourraient être destinés à d’autres fins, comme le financement de mouvements politiques, sans lien direct avec le coup d’État.
Si ces recours aboutissent, notamment en ce qui concerne Olivier Boko, et qu’il était libéré avant les élections, cela pourrait alimenter des spéculations sur une possible stratégie orchestrée par le président Talon pour préparer sa succession en 2026.
Cette thèse me paraît très peu probable quand on se souvient que depuis longtemps déjà, trois ministres Oswald Homeky Séverin Quenum et Hervé Hèhomey ont été limogés brutalement pour avoir suscité la candidature de Olivier Boko au mauvais moment et pour avoir soutenu les mouvements politiques OB 26 ça et là dans le pays,
quand on se souvient que le président de la république n’a pas hésité à limoger son propre cousin Mr Dagnon de la présidence,
Quand on se souvient qu’il déclara dans l’une de ses conférences de presse que seuls les partis politiques seront désormais habiletés à désigner les candidats aux élections municipales législatives et présidentielles compromettant ainsi le dessein caché du sieur Olivier Boko
On peut aussi se rappeler les déclarations énigmatiques sévères du Président de la république le 20 décembre 2024 dernier à l’assemblée nationale lors de sa présentation de l’état de la nation devant les parlementaires, discours dans lequel il s’insurgea contre « les aventuriers incompétents nostalgiques de notre passé honteux. »
Après tant de prises de position, il n’est pas pensable que le président ait organisé lui-même un tel cirque dans le but d’installer son bras droit au palais de la Marina en 2026.
Même si les instances judiciaires supérieures régionales ou internationales libéraient Olivier Boko à temps, il faut encore que le président de la république Patrice Talon se laisse convaincre à temps qu’il faut modifier le code électoral dit « d’exclusion » par les uns et les autres, pour permettre à Olivier Boko entre autres candidats de pouvoir se présenter à la présidentielle de 2026; ce qui me paraît très très peu probable.
Wait and see.
Omer Chanvoedou